Sixième et avant-dernier volet de notre série d’interviews avec Guilhem Cauchois. Ce jeune artiste de 26 ans a réalisé son rêve : travailler au Cirque du Soleil. Aujourd’hui porteur dans un duo de trapèze qu’il forme avec sa partenaire Sarah Tessier rencontrée à l’Ecole Nationale de Cirque de Montréal, Guilhem est actuellement en tournée australienne avec le spectacle Totem. L’artiste globe-trotteur, ancien élève du Cirque Nomade, a pris le temps de se confier sur son expérience.
Quelle est ton histoire avec le Cirque Nomade ?
Guilhem : J’ai découvert le Cirque Nomade à l’âge de 7 ans, il y a presque 20 ans ! A l’époque, l’association s’appelait l’EACS, l’Ecole des Arts du Cirque et du Spectacle. Je fréquentais l’école une fois par semaine le mercredi après-midi. Je me souviens avoir tout de suite été séduit par l’ambiance très familiale. On peut dire que j’étais un « gym rat », comme disent les Anglo-Saxons ! J’adorais arriver à l’école en avance ou rester un peu plus tard après les cours pour regarder les plus anciens s’entraîner, répéter des spectacles, ou juste m’amuser avec eux. Et puis j’ai grandi et progressé, et Gaël, le directeur et fondateur de l’école, a commencé à m’emmener avec lui sur des prestations. Au début, j’étais là simplement pour aider à porter le matériel, et puis, au fur et à mesure, il a commencé à me proposer des petites prestations ici et là. Une chose en entraînant une autre, ma relation avec Gaël et mes amis de l’école s’est approfondie, et le Cirque Nomade est très rapidement devenue ma deuxième famille.
Je suis resté au Cirque Nomade jusqu’à l’âge de 20 ans puis, je suis parti poursuivre mes études de cirque au Canada. Pendant 13 ans, le Cirque Nomade, en plus d’un enseignement artistique qui m’a permis d’avoir la carrière que j’ai aujourd’hui, m’a surtout transmis des valeurs humaines, m’a aidé et soutenu à travers toutes les épreuves qu’un enfant, un adolescent et un jeune adulte peut avoir à rencontrer. La philosophie de l’école a toujours été que l’enseignement artistique visait à l’épanouissement personnel. En tant qu’artiste international aujourd’hui, je peux affirmer que c’est une chose extrêmement précieuse et rare. C’est précisément pour cette raison qu’à chaque fois que je rentre sur Boulogne, je mets un point d’honneur à venir enseigner, assister, ou donner un cours au Cirque Nomade. Même si je suis en tournée à 99% du temps, je tiens à participer à la vie de ce lieu.
A quel moment as-tu envisagé de faire de ta passion un métier ?
Guilhem : Quand j’étais ado, je me disais que ce serait « trop cool » de devenir un artiste de cirque mais je ne voulais pas vraiment y penser. Quand je suis entré en sport-études en classe de seconde, les choses sont alors devenues un peu plus sérieuses. Mais la période où je me suis vraiment dit : « O.K, on essaie, c’est parti », c’était en terminale au moment où il fallait faire ses choix d’orientation post-bac. On peut dire que devenir artiste professionnel a toujours été un rêve, quelque chose que j’avais toujours espéré, mais c’est à ce moment-là que ma décision s’est vraiment prise.
Qu’est-ce qui t’a décidé à rejoindre la formation professionnelle du Cirque Nomade ?
Guilhem : Au moment où j’ai intégré cette formation au Cirque Nomade, cela faisait déjà dix ans que je faisais partie de l’association. C’est donc naturellement que j’ai voulu intégrer sa formation professionnelle. J’ai voulu suivre un programme sport/études afin de me perfectionner en vue de mes potentielles auditions pour les écoles supérieures. En fait, au début, j’avais surtout envie de me perfectionner tout court. Je voulais m’entraîner de façon plus sérieuse et soutenue. La formation pro offrait vraiment un enseignement particulier et c’est cela qui m’a séduit. On a eu la chance d’avoir tout le temps des intervenants extérieurs, des artistes, professeurs, etc., issus de différentes disciplines (cirque, danse, théâtre). L’ambiance était vraiment géniale !
Si tu devais retenir 3 souvenirs ou choses essentiels de ton expérience au cirque nomade, quels seraient-ils ?
Guilhem : Tout d’abord, je me souviens d’un cours avec notre professeur d’aérien qui, un jour, a décidé qu’on ne ferait pas d’aérien, mais de l’escrime. On n’était pas vraiment emballé par cette idée ! Mais c’est là qu’il nous a dit qu’aucun apprentissage n’était superflu, et que dans ce métier « tout servait ». Ensuite, je retiens ce que Gaël a dû me répéter un milliard de fois : « un artiste doit rester humble ». Enfin, je retiens que le spectacle est certes notre métier mais que l’on doit toujours le faire avec passion.
Suite à ta formation au Cirque Nomade, tu as tenté et réussi le concours d’entrée à l’École Nationale dE Cirque de Montréal : comment s’est passé ta rencontre avec ta partenaire Sarah ?
Guilhem : Quand j’ai auditionné à l’Ecole Nationale de Cirque de Montréal, je me suis présenté en solo, mais j’étais ouvert à la pratique d’une discipline en duo. J’avais en effet eu la chance durant ma formation au Cirque Nomade de toucher à plusieurs disciplines de groupe et je voulais me diriger vers ce type d’acrobatie. Ma partenaire actuelle, Sarah, venait d’effectuer une année de formation préparatoire à Montréal et cherchait un partenaire de trapèze. Le dernier jour des auditions, l’école nous a fait essayer le trapèze ensemble et je présume qu’ils ont dû déceler notre potentiel ! Un mois et demi plus tard, je recevais un e-mail m’annonçant que j’étais reçu au programme en temps que spécialiste du trapèze duo avec Sarah.
Médaillé d’or au Festival Mondial du Cirque de Demain en 2013, tout comme ton ancien camarade Michaël(LIRE SON INTERVIEW ICI), tu travailles aujourd’hui au Cirque du Soleil sur le spectacle Totem : peut-on dire que tu as concrétisé deux rêves de gosse ?
Guilhem : Oui, c’est sûr que j’ai réalisé deux, et même trois rêves de gosse ! C’est un grand honneur et une grande chance que j’ai de jouer sur la scène du Cirque du Soleil tous les jours ! De même pour le Festival Mondial : Gaël nous emmenait chaque année voir le festival et c’était toujours un événement très électrisant pour nous ! Donc d’avoir eu l’opportunité de jouer sur cette scène mythique, avec Michaël, et en plus, de remporter à ses côtés une médaille d’or a été un moment que je n’oublierai jamais…
Que peut-on te souhaiter de plus pour la suite de ta carrière ? As-tu d’autres projets à venir ?
Guilhem : J’ai deux autres projets en cours. Le premier n’a rien à voir avec le cirque, puisque je viens d’ouvrir « L’Epicurianu », un bar à vin et à tapas corse rue de la Folie Méricourt, à Paris. De passage à Paris le mois dernier, j’ai pu participer à son inauguration le 29 mai. Nous sommes 4 à la tête de ce projet, dont un ami d’enfance de Boulogne et son père. C’est un projet très excitant car cela n’a rien à voir avec le milieu du spectacle, même s’il est vrai que la cuisine est une forme d’art et qu’il y a aussi un rapport avec un « public ». Par ailleurs, je travaille depuis un an déjà sur un autre projet artistique et nous ouvrirons avec un de mes amis et collègue notre propre société de production d’ici quelques semaines. Nous avons déjà deux commandes pour des performances qui auront lieu en août 2016 et août 2017. Je ne veux pas en dire trop mais je passe la plupart de mon temps libre à travailler sur ce projet qui implique des artistes japonais ! Je fais énormément de choses en même temps et j’ai donc peu de temps libre mais je suis passionné par ce que je fais. J’ai choisi d’être un artiste professionnel et je l’assume pleinement !
Un conseil pour nos futurs candidats à la formation pro ?
Guilhem : Soyez ouverts et disponibles. Il n’existe pas une seule route à suivre pour devenir un artiste. Vous avez sûrement des attentes et une idée préconçue de ce qu’il faut apprendre pour devenir un artiste de cirque mais d’après mon expérience et les rencontres exceptionnelles que j’ai pu faire avec des artistes non moins exceptionnels, je peux vous dire que vous avez chacun votre propre apprentissage à faire. Et justement, il y un détail important auquel le Cirque Nomade porte une grande attention : c’est de respecter le caractère unique de chaque étudiant…
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